top of page
Photo du rédacteurCamille Lagier

Témoignage N°1 - Aurore | Syndrome de Stevens Johnson

Bonjour à tous !


Voici le tout premier témoignage pour le blog, qui j'espère aidera un bon paquet d'entres-vous ! J'ai eu la chance de rencontrer la très jolie Aurore.

Aurore est une battante, elle a croisé la route du Syndrome de Stevens Johnson en Octobre 2013, cette maladie a bouleversé sa vie, mais aujourd'hui Aurore en ressort plus forte, et déterminée à vivre de la plus belle façon qu'il soit.



"La vie est belle, profitons ! "

--- PORTRAIT ---

Prénom : Aurore Age : 30 ans Emploi : Assistante Sociale Lieu de résidence : Val d’Oise 95


Décris toi en quelque mots.

"Je suis une personne avec du caractère, bien trempé comme dirait mes proches, franche, honnête et parfois impulsive. Je fais les choses avec le cœur, ce qui peut parfois être un défaut ;-) J’adore rire, de tout, de rien. Je pense, au final, être une personne simple, avec des valeurs, faisant souvent passer les autres avant moi."

Quelles sont tes passions / passe-temps favoris ?

"Ma passion principale, mon fils, il est ma priorité, et le voir évoluer, grandir, me passionne.

Bien sûr, je fais des choses pour moi, comme instagram, faire des photos, partager ; c’est devenu une vraie passion, qui prend du temps. J’ai réappris à aimer le sport également. Puis j’adore faire les magasins, resto, ciné, sorties, chill devant netflix, balades, visites…"


--- TON HISTOIRE ---


Qu’est-ce qui te pousse à partager ton histoire aujourd’hui ?

"Je pense que c’est important de montrer qu’après avoir vécu une expérience comme celle-ci, traumatisante, on peut s’en sortir. Et vivre, tout simplement. Tout parait tellement flou pendant, et même après… Nous sommes peu à vivre cela, et donc les témoignages sont rares, alors si ça peut aider, ne serait-ce qu’une personne… Il faut le faire."


Quel syndrome as-tu eu ? Quel âge avais-tu ?

"J’ai eu le syndrome de Stevens-Johnson, j’avais 26 ans, c’était au mois d’Octobre 2013."

Raconte-nous le vécu de ta maladie.

"Les symptômes sont arrivés progressivement, à partir du 23 Octobre. Je pense que c’est important de développer cette partie, car si certaines personnes sont susceptibles de l’avoir, certains signes ne trompent pas. Mais quand on ne connait pas, on ne fait pas forcément attention.


J’ai d’abord eu très mal aux yeux, très secs, sans explication. Une allergie au maquillage peut être ? Alors je suis allée en pharmacie me chercher du sérum phy. Aucun changement.


Le lendemain matin, la douleur était plus intense, et mes lèvres avaient doublé de volume. Je prends peur, j’angoisse. Le médecin, l’après-midi (un en urgence que je ne connaissais pas), me dira que c’était une allergie alimentaire. Ok, antibio.


Le lendemain, toujours les mêmes douleurs… enfin, en pire. Et mes lèvres qui s’arrachent, plus gonflées encore, mes yeux rouge sang… Et toutes mes muqueuses touchées. Quand je vous dis toutes, c’est toutes. Impossible de marcher, trop mal, douleur trop vive. Le médecin de SOS médecin ne comprend pas. Il me dira dans un premier temps que j’ai un herpès généralisé. WHAT ?? J’en ai jamais eu !! Donc dès que j’aurais une petite angoisse, ce sera ça ?? Puis, il prend son temps, me redemande quel médicament j’ai pris… Il me demande si j’ai des boutons sur le corps. Non… « déshabillez-vous s’il vous plait ». Et là, des boutons, partout, sur les bras, le ventre, le dos, les jambes, les muqueuses bien sûr… il s’informe et me dit "passez une prise de sang en urgence."


Il m’a dit herpès généralisé, je suis restée là-dessus, en me disant, ça va passer avec les médocs et lundi je retourne bosser (on était vendredi soir). Aucune possibilité de faire cette put**n de prise de sang le week end, personne n’a voulu se déplacer. Non, c’est pas une urgence, bah non.


Mon compagnon de l’époque était beaucoup plus angoissé que moi. Je m’étais convaincue que ça passerait. Alors que le week end, ça s’est empiré, mes lèvres se sont collées, impossible de parler, de manger, juste le trou d’une paille (pour boire du Yop).

Le dimanche soir, mon cœur s’est emballé, une impression de poitrine qui va s’arracher, et ça ne s’arrête pas.


Urgences le lundi matin, et on te dit au bout d’heures interminables qu’on ne pourra pas te soigner, on te donne pas d’élément… je ne pouvais ni marcher, ni parler, ni boire… J’étais défigurée… J’avais peur pcq j’avais entendu le nom de ce put**n de syndrome dans la bouche de ce put**n de médecin, qui ne voulait rien m’expliquer. Mon corps battait vite, toujours plus vite. J’avais mal, mais mal où ? Mon corps entier avait mal.


J’ai été transférée aux urgences de Créteil, au CH Henri Mondor, service Dermato, spécialisé dans ce type de syndrome. Je passe devant tout le monde, je suis gênée, j’entends « pronostic vital engagé, tachychardie, mettez-vous nue, totalement nue, on va vous garder, c’est grave mademoiselle, vous êtes arrivée à temps, on va prendre soin de vous, beaucoup de soins, chambre en soin intensifs » et ça s’emballe… Je veux pleurer mais je peux pas, non, j’ai trop mal aux yeux alors je me ressaisis.

On prend des photos de tout mon corps, sous toutes les coutures (je dis bien TOUTES, assez traumatisant sur le coup), je suis « un cas » pour l’équipe, les médecins, les étudiants, les soignants, le professeur.


Je ne les remercierais jamais assez car ils ont tous été en or durant mon « séjour ». Des soins toutes les heures, puis les deux heures, puis ça s’espace au fil des jours. Un énorme radiateur au-dessus de moi, pour éviter à mon corps de se fatiguer plus, qui ne l’est déjà. Les yeux à traiter, les muqueuses bah oui, les boutons qui, en fait, ne sont pas des boutons mais la peau qui se nécrose (en gros, tu meurs), les nombreux examens, radio des poumons, biopsies…


Ça fait mal… c’est ce que me disent les gens autour de moi parce qu'en vérité, je ne me rappelle plus, merci la morphine."


Qu’est ce qui a été le plus dur pour toi durant l’hospitalisation ?

"Le plus dur, ce n’était pas moi pendant l’hospitalisation mais mes proches, mon compagnon, ma mère, mon frère, ma meilleure amie, mes amies…


Quand tu vois le regard des autres, quand tu sens leur peur… c’est horrible. Moi, dans ma chambre, j’étais bien, avec les soignants, je rigolais. Je pensais même plus au fait que j’étais défigurée, je me suis dit que ça s’effacerait. Je me disais même pas que j’étais malade, je l’étais pas pour moi. Sincèrement, j’ai été dans le déni… trop longtemps.


J’ai vu mon compagnon pleurer, j’ai vu la peur dans ses yeux. Sans lui, je ne serais pas là pour faire ce témoignage aujourd’hui. Il m’a sauvé la vie.

J’ai entendu ma mère tomber dans les pommes, après m’avoir vu. Ma meilleure amie a pleuré dans mes bras.


Et moi, je comprenais sans comprendre. Je me demandais ce qu’ils avaient à être comme ça. Eh oh les gars, je suis hospitalisée, pas morte et je vais sortir hein, ça va aller. Bref, j’étais dans mon monde. Perchée peut-être.


J’ai eu peur aux urgences, j’ai eu peur en arrivant, mais une fois prise en charge, je n’avais plus peur. J’étais comme dans un cocon. En fait, je ne sais pas de quoi j’avais peur. Je voulais juste rentrer chez moi."

Comment était le personnel soignant avec toi ? Ont-ils joué un rôle important selon toi ?

"Le personnel à Henri Mondor a été, mais tellement, gentil. Une gentillesse incroyable, des gens terriblement humains, dévoués. Jamais ils ne m’ont fait mal, tellement rassurants et prévenants. Ils ont toujours été là, dès la moindre question, le moindre besoin.


Je ne pourrais jamais assez les remercier.


Ils étaient assez étonnés que je me remette si vite et que j’aille aussi bien, vu l’état d’arrivée".



Comment as-tu vécu la sortie de l’hôpital ?

"Aïe… La sortie de l’hôpital… Pour mes proches et moi… un enfer… On m’a sorti de mon cocon, j’y étais bien et surtout pas prête à sortir, pas si vite, non.

Je me suis vite remise alors pourquoi me garder ?

Je suis sortie de ma chambre, je suis arrivée dans le hall de cet hôpital, si grand et j’ai eu peur, j’ai tremblé. Il faut reprendre ma vie… après ça ? Comment ?


Arrivée chez moi, la moindre chose me contrariait et j’ai fait vivre un calvaire à mon compagnon et ma mère, présente pour quelques jours. Je pleurais pour tout et rien. En fait, toutes les peurs que je n’ai pas eues pendant l’hospitalisation, je les ai eues là… et c’est terrible, effrayant.


Je ne voulais plus aller dormir… pourquoi aller dormir, alors qu’il faudra se lever demain et recommencer une journée ? Dans quel but ? Et pourquoi sortir, t’as vu ma tête ??


Je ne voyais plus le sens de la vie, de ma vie… le syndrome post-traumatique ils appellent ça. Encore un syndrome, c’est une collection ?? J’allais faire quoi après ça ?

Puis c’est passé…"


As-tu pu recommencer à manger normalement rapidement ?

"Non, pas rapidement… Quand tu es perfusée un moment puis que tu as des boissons dégueu parce que tu ne peux rien prendre d’autre, c’est pas si simple de manger normalement après. Ton corps ne t’appartient plus vraiment. "


Quelles ont été tes séquelles ? Comment on-t-elle évoluées avec les années

"Par miracle, je n’ai aucune séquelle à ce jour.


Au niveau esthétique, je garde des traces de mes biopsies. Mais sinon, rien. Et vous auriez vu ma tête… et l’état de ma peau… Ce qui a été long à partir, ce sont les traces de ma peau nécrosée sur tout le corps. Mais c’est parti. Et mes lèvres ont eu quelques difficultés à se remettre tant elles étaient à vif. Aujourd’hui, elles gardent une certaine fragilité.


Par contre, rien d’autre, mes yeux, bouche, nez, gorge, poumons, muqueuses ont été touchés pendant la maladie, mais n’ont gardé aucune séquelle. MERCI.


Par contre, je suis devenue réactive à énormément de médicaments."


As-tu eu un suivi médical après ta sortie / des traitements / Si oui, lesquels ?

"Oui, j’ai eu un suivi médical d’abord très rapproché en termes de semaines. Parce que les séquelles peuvent arriver à court, moyen et long terme.

Puis cela s’est espacé en termes de mois.


Aujourd’hui, je ne suis plus suivie. Les seuls traitements étaient des traitements « basiques » pour les yeux surtout et ma peau. Cela a duré un mois environ après l’hospitalisation."

As-tu pu parler de ton expérience et de ton vécu à un psychologue, afin de verbaliser tes émotions ? Si non, penses-tu que cela aurait pu t’aider ?

"Non, je n’en ai pas parlé, cela ne m’a pas été proposé au moment de la sortie, faite trop rapidement à mon goût. Mais j’en aurais eu bien besoin.


Et je le conseille fortement, parce que même si on est entouré, personne ne peut comprendre… Et je leur ai dit que c’était un couac et que j’espérais qu’ils le proposent aux autres…"


As-tu été soucieuse du regard des autres après ton syndrome ? Que faisais tu pour aller au-delà de leur regard ?

"Physiquement, je me suis vite remise donc assez rapidement, cela ne m’angoissait plus du tout."


--- TES ASTUCES ---


Qu’est ce qui aurait pu t’aider au moment de l’hospitalisation pour que tu te sentes moins mal psychologiquement ?

"Comme je l’ai dit au-dessus, pendant l’hospitalisation, j’étais plutôt bien mais j’aurais aimé qu’on me prépare à la sortie."


Que conseilles-tu aux personnes hospitalisées pour que leurs journées soient moins pénibles ?

"Personnellement, j’avais des visites tous les jours, je regardais les conneries à la tv, je parlais avec tous les soignants, je faisais des mandalas, je regardais instagram ;-) Je ne restais pas vraiment inactive donc pas le temps de penser à ce que j’avais."


Que faisais tu après ta sortie de l’hôpital pour avoir moins peur / pour te changer les idées et recommencer à être légère comme avant ?

"Au début rien… puis doucement, j’ai recommencé à prendre soin de moi comme avant, à bouger, m’habiller, à rire devant les conneries de la télé.

Et j’ai repris le travail un mois après la sortie. Sûrement trop tôt car très affaiblie mais ça m’a fait un bien fou."


Quelles astuces pratiques « bien être » peux-tu nous conseiller pour réapprendre à se sentir mieux ?

"Pour se sentir bien, c’est vrai que prendre soin de soi, il n’y a rien de mieux. Et il y a différentes façons : le sport, les soins, le maquillage, le shopping. Et sortir, parce que plus on s’isole, moins on a envie de sortir, c’est un cercle vicieux.

Il faut reprendre sa vie d’avant, tout en sachant qu’au fond de nous, nous sommes changés."


Comment tes proches t’ont-ils accompagné ?

"Du mieux qu’ils pouvaient, selon si je les laissais faire ou non. Mon compagnon de l’époque a été d’une patience extraordinaire et je ne le remercierais jamais assez pour ça, que ce soit pendant ou après.

Ils étaient très présents, même sans être là physiquement. Des petits mots, des messages, des appels, des fleurs, des visites. De la gentillesse à l’état pur."

Que conseilles-tu aux proches de personnes qui vivent un SSJ ou un Lyell ?

"De ne surtout pas perdre espoir, de se laisser soigner. Et de patienter pour se retrouver."

Fais-tu des recherches sur le SSJ ou sur le Lyell sur internet ? Cela t’aide-t-il ?

"J’en ai fait avant mon entrée en hospitalisation et je n’aurais pas dû… ça m’a totalement angoissé…"


Penses-tu qu’une autre approche est nécessaire pour aider les personnes après leur hospitalisation ? Si oui, qu’est ce qui aiderait ces personnes selon toi ?

"Il faut absolument un suivi psychologique et surtout, que la sortie soit préparée, connaitre la date à l’avance.

Préconiser ce qui pourrait faire du bien, montrer des exemples de personnes ayant été malades et qui s’en sont sorties."



Aujourd’hui, penses-tu que tu as retrouvé goût à la vie et aux bonnes choses ?

"Oh que oui !! J’ai réussi à avoir un enfant alors Stevens est loin derrière."


Qu’est ce qui te rend heureuse au quotidien ?

"Mon fils et toutes les petites choses qui embellissent la vie. Je me contente de peu, de tous les petits bonheurs."

Comment réussis-tu à lâcher prise, et à te sentir légère ?

"Instagram m’a beaucoup aidé, c’est un exutoire pour moi, c’est mon moment de futilité mais tellement nécessaire à mon quotidien. Les messages que je reçois sont tellement bienveillants.

J’ai repris également le sport et cela me fait beaucoup de bien, me vide l’esprit.

Bien sûr, tous les moments avec mes proches, mon entourage, famille, amis sont des moments de bonheur."


Comment cette maladie a-t-elle changé ta vie ?

"Quand tu passes près de la mort, parce que c’est ça la réalité de ce syndrome, tu prends conscience que la vie peut s’arrêter en un claquement de doigts.

Alors le principal, c’est d’être heureux et de faire les choses avec le cœur, peu importe si ce sont des erreurs ou non, il ne faut pas avoir de regret. J’ai appris à penser à moi, avoir mes moments."

As-tu quelque chose à ajouter que j’aurais oublié ?

"La vie est belle, profitons ! Et surtout, pour ceux ou celles qui auraient ou auraient eu ce syndrome, cela ne vous définit pas. Vous n’êtes pas qu’un SSJ ou Lyell. Vous n’êtes pas une maladie. Elle ne vous définira jamais, elle est entrée dans votre vie, dans votre chair toute entière mais restez-vous-même et combattez là.

Mon fils est là pour le prouver."


----


MERCI Aurore pour ce beau témoignage ! Tu nous prouves à tous à quel point les coups durs peuvent nous rendre plus forts, et que la vie ne s'arrête pas après une telle épreuve <3 <3 <3


N'hésitez pas à aller faire un tour sur le Blog de Aurore en Cliquant ICI ;-)


A très vite !!

NEVER GIVE UP !


Camille


1 840 vues

Opmerkingen


bottom of page